Cherki-Haaland, décryptage d'un coup de foudre technique
C'est un ratio assez fou qui permet d'apercevoir une étincelle, en même temps qu'un total qui rappelle que leur relation n'en est qu'à ses balbutiements. Depuis le début de la saison en Premier League, Rayan Cherki n'a réussi que six passes pour Erling Haaland, mais cinq d'entre elles - soit 83 % - ont permis à l'attaquant norvégien de tirer au but !
« Sa créativité dans le dernier tiers est extraordinaire, et à certains moments, dans certains matches, on aura évidemment besoin de lui », prévenait Pep Guardiola quelques jours plus tôt au sujet de Cherki, dans un mélange d'admiration et de prudence.
Car sa recrue estivale est encore loin de s'être extirpée d'une concurrence féroce (Foden, Doku, Savinho, Marmoush, voire Bernardo Silva ou Reijnders...) et doit encore « s'adapter à notre dynamique de jeu et au rythme de la Premier League ».
Mais l'entraîneur catalan aime aussi répéter que son numéro 10 « apporte quelque chose d'unique dans le dernier tiers » avec son arsenal créatif. Et le premier bénéficiaire devrait bien être Erling Haaland, dont la manière d'attaquer la ligne défensive se marie idéalement avec la capacité de Cherki à la briser par une passe que personne, parfois, n'avait osé imaginer.
Du pied droit comme du pied gauche, s'il faut encore le rappeler, mais aussi... de la tête sur l'ouverture du score face aux Cherries.
Au-delà de ses deux offrandes du week-end dernier, et malgré un temps de jeu commun jusqu'ici limité (185 minutes, Coupe du monde des clubs cet été comprise), on voit d'ailleurs régulièrement Cherki - tenter de - trouver son avant-centre d'une passe qui prend la défense adverse de court.
« Avec lui, c'est facile, je n'ai pas besoin de réfléchir cinquante ans, en fermant les yeux, je lui mets le ballon où il faut, comme il veut, et il n'a plus qu'à finir le boulot », appréciait le Français de 22 ans dimanche, au micro de Canal+.
L'intégration de l'international français (2 sélections, 1 but) et la liberté qui lui sera accordée dépendront aussi de l'ampleur de l'évolution stylistique opérée par Guardiola cette saison.
Entre les départs (De Bruyne, Ederson, Gündogan, Walker, Grealish...) et les blessures (Rodri, Stones), l'ossature de l'équipe qui avait remporté la Ligue des champions 2023 et quatre titres consécutifs en Premier League (de 2021 à 2024) s'est envolée. La sacro-sainte obsession du contrôle aussi ?
Cette saison, City a en tout cas bouclé un tiers de ses matches sans dépasser les 53 % de possession et affiche « seulement » la quatrième plus haute moyenne de Premier League (57 %). Et avec 4 buts marqués sur contre-attaque en Championnat, les Skyblues ont déjà dépassé leur total de la saison dernière (3)...
Une mutation assumée par le technicien catalan, qui cherche encore le bon équilibre et la structure adéquate, mais n'hésite donc plus à associer des joueurs créatifs, plus « verticaux », friands de grands espaces et d'un tempo plus frénétique.
Ça tombe bien, leur avant-centre apprécie aussi cette configuration. La formule utilisée contre Bournemouth, un trio Cherki-Foden-Doku, très axial en soutien de Haaland, a livré suffisamment de promesses et de complémentarité pour qu'on imagine que le plan de départ - contrarier le pressing agressif de l'adversaire - puisse devenir un projet à long terme.
Et au milieu de dribbleurs purs (Doku) ou de perforateurs balle au pied (Foden, Reijnders), la science de la dernière passe de Cherki a de quoi séduire Guardiola comme Haaland, orphelins de leur playmaker fétiche depuis cet été.
Mettre De Bruyne et Cherki dans la même phrase à Manchester semble prématuré, évidemment. Mais quand c'est Erling Haaland, après avoir bénéficié de 20 passes décisives du Belge en trois saisons, qui prend ce risque, on a le droit d'y prêter une oreille attentive.
« Il a cette capacité spéciale, qui est difficile à expliquer, un peu comme l'avait Kevin, cette faculté à lancer quelqu'un en profondeur depuis n'importe quel endroit du terrain », décrivait le Norvégien mardi face à la presse, gestes de la main à l'appui, cherchant à mimer, peut-être, ce qui ressemble à une étincelle.
L'Équipe




